faire-part de décès de Pepinduval

Ninouchka avait rejoint Andeol pour aller voir son amie Elisel. Elle avait à lui demander un bien triste travail.

Arrivée devant les grilles, elle hésita un moment. Allait-elle faire appel aux services de Pirlouit ou bien allait-elle se glisser ni vu ni connu jusqu'à l'atelier d'Eli ?

Elle opta finalement pour la discrétion n'ayant pas le courage de faire face aux facéties du valet dans l'état dans lequel elle se trouvait. Elle choisit d'autant plus cette solution, qu'elle avait averti la maîtresse des lieux qu'elle passerait la voir.

Elle se dirigea vers l'atelier, y pénétra après avoir frappé doucement à la porte. Elle espéra ne pas déranger Eli à un mauvais moment.

Celle-ci était penchée sur une de ses oeuvres, le pinceau à la main.

Bonjour Eli, je suis venue aussi vite que possible comme tu vois. Je me doute qu'il te faut un minimum de temps pour réaliser le travail que je désire te confier.

Ninouchka déposa sur une petite table le texte qu'elle avait rédigé

Citation :

Ninouchka du Val Ancien a la profonde douleur de vous faire part du décès de son époux Pepin du Val Ancien, dict Pepinduval.
Il a exprimé le désir d'être inhumé à Blois qu'il a tant servi. Une messe solennelle y sera célébrée par messire Adalberan, curé de l'église de Blois, le 29 février 1460.

Voilà le texte Eli, tu aménages la longueur des lignes comme tu veux en fonction de la présentation.

J'aurais aimé un faire-part horizontal (genre la longueur = 2 fois la hauteur) avec peut-être en léger fond un paysage très dépouillé du style un arbre se détachant sur l'horizon. Pour le ton, j'aurais choisi un vert très doux légèrement gris peut-être.

Si tu veux je reste près de toi pour pouvoir te dire au fur et à mesure si c'est bon ...

[hrp : je serai sur msn à partir de 21h30, donc on pourra communiquer si besoin ^^]

Les voilà une fois de plus réunies toutes les deux. Une fois de plus dans de tristes circonstances. A croire que toutes deux ne fréquentaient plus que les églises pour les enterrements et les cryptes et cimetières où on déposait leurs proches.

Elles s'embrassèrent affectueusement, puis la baronne d'Andéol proposa un siège à Ninou.

Celle-ci s'installa avec plaisir pour plusieurs raisons ... elle allait pouvoir suivre le travail d'Eli et la guider dans ce qu'elle désirait, elle ne devrait pas refaire la route entre Blois et le domaine alors qu'elle se sentait si fatiguée et enfin la chaude affection de son amie lui faisait du bien.

Elle suivait les gestes d'Elisel, des gestes sûrs, posés, apaisants. Ninou ne quittait pas des yeux les préparatifs de ce qui allait devenir un faire-part de décès.

Petit à petit les choses se précisaient et finalement Elisel lui tendit une premier essai.

Ninouchka regarda attentivement chaque détail puis leva les yeux sur son amie.

Pour le texte, tu as bien fait de modifier ... le fond coloré du parchemin j'aime bien ainsi que la couleur de l'écriture.
Par contre, je voudrais un style d'écriture qui corresponde mieux à Pepin ... quelque chose de plus carré, de plus droit, de plus sobre ... quelque chose qui lui corresponde plus.

Elle regarda encore le travail qu'elle avait dans les mains. Elle n'arrivait pas à identifier ce qui la gênait quand tout à coup, elle comprit l'origine de son sentiment.

C'est l'arbre qui ne va pas Eli, c'est l'arbre ... Oh excuse-moi, je te parle comme si tu avais pu suivre ma pensée ...

Ninouchka sourit et reprit le fil se son idée

L'arbre ... il a l'air mort ... je voudrais un arbre sans feuilles mais vivant ... tu comprends ? Isolé sur une petite hauteur ... je vais te raconter quelque chose.

Avant notre mariage, Pepin m'a emmenée au Val Ancien, le domaine de sa famille. Là, il m'a entraînée dans les jardins mais sans s'y attarder au point que je me demandais à quoi ça servait de les traverser. Puis arrivés au bout, il m'a fait gravir une petite colline surmontée d'un seul arbre. Au pied de l'arbre, il y avait une tombe ... celle de son père auquel il voulait me présenter avant de m'épouser.
Avant qu'il ne meure dans mes bras, il m'a dit qu'il voulait reposer à Blois, près de moi mais que je devais aller à Montargis enterrer ses objets personnels auprès de son père.

Ninouchka s'arrêta de parler quelques instants, puis regardant son amie

Je voudrais un arbre sur le sommet d'une petite colline Eli, un peu comme pour le relier à sa famille.

La peinturlureuse scrutait attentivement les traits de son amie. Elle aimait deviner les pensées de ceux pour qui elle travaillait, rien que par leurs réactions, les sentiments qui transparaissaient sur leurs visages. Ce qu’elle préférait, c’était voir une étincelle s’allumer au fond de leurs yeux, signe qu’elle avait répondu correctement à leur attente, et elle n’était satisfaite que lorsque cet éclat apparaissait. Jusqu’à cet instant, elle travaillait, modifiait, retouchait, ajustait, afin de coller au plus près de la demande. Et c’était parfois ardu quand la commande n’engendrait pas dans sa tête la même image que celle que voyait déjà son "client".
Elisel savait que son amie avait une idée bien précise, rien qu’en écoutant les instructions initiales. Collera du premier coup, collera pas…? Bon bah, collera pas pour cette fois, son visage le disait avant même ses mots.

Pour l’écriture, je peux modifier mon coup de poignet sans souci. J’ai sûrement été influencée effectivement par mes propres goûts.

Ninou semblait encore hésitante, comme si quelque chose d’autre la perturbait. Elisel examina avec elle son brouillon, à l’envers, pendant qu’elle réfléchissait. Qu’est-ce que n’allait pas ? Ah, trouvé !

J’avais bien deviné que ça n’allait pas. J’ai appris à voir quand mon travail convient ou non.

Un sourire, avant d’écouter la suite de son explication. Et son visage de s’éclairer, comme si une bougie s’était allumée soudainement au dessus de sa tête.

Oh oui, je vois ! Effectivement, à la lumière de cette histoire, mon illustration ne convient pas du tout !

Et la voilà fébrile, à prendre à l’aveugle un nouveau parchemin-brouillon, barbouiller rapidement le fond, puis esquisser cette fois-ci des taches légèrement bleutées pour un ciel parsemé de moutons, et un arbre majestueux, dressant sa fière ramure encore vierge des bourgeons du printemps.
Une pause, quelques instants de réflexion, des griffonnages sur le précédent essai, puis elle traça d’une main sûre les lignes du texte, d’une nouvelle écriture, plus massive, plus virile.

Verdict ?